Refondation de l'école : les dindons prennent la parole

phil833

/ #1657 lettre ouverte à mon député PS

2013-02-12 13:22

Bonjour à tous, j'ai mailé cette lettre à mon député PS (je vous invite à en faire autant)

Bonjour D.,

Depuis quelques semaines, une incompréhension profonde est en train de s'installer entre les enseignants et le gouvernement PS. J'entends dans les cours de récrés de plus en plus de propos comme ceux-ci : Pourquoi le PS se met-il à taper sur son propre électorat? C'est suicidaire... ou alors J'ai voté PS en 2012, mais c'est fini, plus jamais je ne me ferai avoir. Cette ambiance me rappelle 2002 et le ressentiment contre Allègre. Beaucoup de mes collègues ont alors voté Chevènement ou ne se sont pas déplacés avec les conséquences que l'on sait.
Il est urgent et important que les gens "d'en haut" comprennent ce qui se passe plus bas.
Moi-même qui suis sympathisant PS depuis toujours, qui aie esayé de convaincre mes collègues de voter Jospin en 2002, nous qui avons réussi à ramener les enseignants vers le PS en 2012, nous avons du mal à adhérer à cette réforme qui semble absurde et vaine.
Il faut comprendre l'état d'esprit des enseignants actuellement.
1) Ils ont besoin de leur mercredi pour récupérer. Il faut être enseignant dans une classe difficile, plonger en apnée dans une arène à 8 h 30 et en sortir à 16 h 30 épuisé, mais ayant encore les parents à rencontrer, les corrections à faire et la préparation du lendemain à gérer, pour savoir qu'un jour au milieu de la semaine permet de se laver le cerveau et de récupérer. Nous allons vers un absentéisme qui va exploser: les enseignants ne sont pas des surhommes.
2) Les enseignants du premier degré sont en train de s'appauvrir. Comment peuvent-ils accepter quelque réforme que ce soit tant qu'ils ne seront pas revalorisés? Comment peuvent-ils entendre parler d'autre chose alors qu'ils subissent une véritable dégringolade sociale ?
J'ai 31 ans de carrière. Et en 31 ans, j'ai vu parallèlement glisser vers le bas la considération dont nous jouissions et le bulletin de paie.
A mes début, un instit 11ème échelon gagnait 10 000 frs et avait droit à un logement de fonction. Trois décennies plus tard, un PE 11ème échelon va avoir autour de 2500 euros net (17 000 de nos ex francs ) sans logement de fonction alors que l'inflation a plus que doublé ( 2 fois et demie). L'Insee a calculé que nous avions perdu plus de 25 % de pouvoir d'achat.
Chaque enseignant devrait gagner un quart de son salaire en plus.
Chaque mois, mon employeur me "vole" 600 euros!
3) Cette réforme se base, ou se baserait, sur des études de chrono-biologistes qui feraient consensus (selon les lieux communs entendus partout), études réalisées en milieu confiné et expérimental, de manière individuelle ou en petits groupes "confortables", loin de la vraie vie et des 25 à 30 élèves entassés dans une salle de 45 m2. Quand on voit ses modalités d'application à Paris ou ailleurs avec une pause méridienne rallongée et des enfants qui reprendront l'école à 14h15 pour finir à 16h30, il faut ne pas être enseignant sur le terrain pour penser qu'ils seront reposés et que ces nouveaux rythmes leur seront profitables.
Pourquoi ne pas nous avoir demandé notre avis ? Quelle est cette pratique nouvelle au PS qui consiste à ouvrir des sites internet où chacun, le boulanger du coin ou l'enseignant, peut déposer son avis, à un titre équivalent, sans tenir compte de l'expérience du professionnel de terrain?

Bilan :
- Les enfants et les enseignants sont fatigués le vendredi après-midi et ils le seront encore plus quand ils ne pourront plus récupérer le mercredi. C'est tellement évident que les anciens, dans leur "sagesse" avaient instauré cette pause au milieu de la semaine.
- Les enseignants seront encore moins argentés, qui devront, en plus, prendre le métro ou la voiture pendant parfois une heure le mercredi matin à 7 h et une autre heure le mercredi à midi, quand ils devront payer une nounou pour garder leurs enfants en bas âge (une collègue a calculé que cela lui coûterait 1500 euros par an) tout cela sans aucune compensation ou si peu que c'en est presque insultant (le fameux "les profs ne font pas ça pour l'argent " de Mr Peillon est méprisant : nous nous sentons pris pour les derniers naïfs utopistes qui vivraient d'aumône et d'eau fraîche et non pour des professionnels expérimentés et compétents qui seraient rémunérés en conséquence)
Et je pense que chaque mercredi matin jusqu'en 2017, en ouvrant la porte de leur classe, les professeurs des écoles se diront merci mr Peillon, merci le PS de me donner la chance de travailler un jour de plus par semaine sans me payer plus.
Cordialement.