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2011-12-26 20:37

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Génocide arménien: Sarkozy à la pêche aux voix

Régis Soubrouillard - Marianne | Jeudi 22 Décembre 2011 à 16:01 | Lu 14584 fois


Sarkozy l'avait promis à Charles Aznavour... et aux 500.000 arméniens de France, qui sont autant d'électeurs potentiels: il ferait voter une loi sanctionnant la négation du génocide arménien, au mépris de toute considération diplomatique, géopolitique et économique. Examinée à partir d'aujourd'hui par les députés, la promesse électoraliste de Sarkozy a été qualifiée de « connerie sans nom » par Alain Juppé.



http://www.marianne2.fr/photo/art/default/942831-1119288.jpg?v=1324489285...

Nicolas Sarkozy entouré de Charles Aznavour et du président arménien Serge Sarkissian
Loi pour la mémoire, geste diplomatique ou cadeau à visée purement électoraliste ? La proposition de loi UMP visant à punir « l’apologie, la négation ou la banalisation des crimes de génocide » qui doit être examinée ce jeudi par le parlement au suscite de nombreux remous au sein du gouvernement et de la majorité. Un nouvel épisode dans le débat sur les lois mémorielles qui, une fois n’est pas coutume, arrive sur le devant de la scène à quelques mois des élections tant celle là paraît motivée essentiellement par des visées électoralistes (les Arméniens de France sont estimés à 500.000 personnes).

La loi sur la pénalisation de la négation du génocide arménien était une promesse formulée par Nicolas sarkozy au peuple arménien et à Charles Aznavour lors d’un voyage en octobre 2010. Dans une interview au Monde, le Ministre turc des affaires étrangères affrirme que Jean-David Levitte, le conseiller diplomatique de Nicolas Sarkozy s’était engagé à abandonner cette initiative. A chaque interlocuteur sa promesse.

A quelques mois des élections Sarkozy s’est fait rappeler  sa promesse par…Charles Aznavour lors d’un rassemblement de la communauté arménienne à Paris en mars 2011. Les Nouvelles d’Arménie Magazine écrivait alors que «  le très attendu Charles Aznavour a réitéré les propos selon lesquels un vote sanction par la communauté arménienne contre le futur candidat Sarkozy aux présidentielles de 2012 était possible. L’icône de la chanson française a déclaré : « Sarkozy doit honorer sa promesse ». 
Sous peine de perdre de précieux bulletins de votes. Un vote sanction communautaire. C’est tout ce que redoute Sarkozy.

Juppé n'a pas le même sens des priorités : « Cette loi va tuer le dialogue avec les turcs » estime le Ministre des affaires étrangères, très énervé par l’irresponsabilité de la démarche. Le Ministre des affaires étrangères a eu le nez creux, sitôt la loi votée, la Turquie a rappelé son ambassadeur à Paris. 

Une repentance à géométrie variable

Dans sa dernière édition, le Canard enchaîné rapporte un clash en conseil des ministres qui a opposé Juppé à Sarkozy : « Je me dois de dire que si cette loi devait passer, ce ne serait pas sans conséquences économiques et diplomatiques avec les Turcs. Il ne faut pas oublier que les Turcs viennent de commander 100 Airbus , qu’il y a 1000 entreprises françaises en Turquie dont Axa. J’aurai prévenu tout le monde sur les graves conséquences que cela peut avoir ».  Sarkozy de botter en touche, expliquant qu’il s’agissait là d’une initiative parlementaire...« sur un créneau réservé par le gouvernement » nuancera Patrick Ollier. 

Juppé abandonnera le langage diplomatique face à ses collaborateurs : « Cette proposition de loi est intellectuellement, économiquement et diplomatiquement une connerie sans nom. On n’a pas à se lancer dans un concours des génocides. Tout ça pour tenter de récupérer les voix des Français d’origine arménienne. C’est ridicule ! ».
D’autres députés de droite ont fait savoir qu’ils ne voteraient pas le texte ou s'abstiendront.

Selon les Echos, le Président de la TOBB (Union, des Chambres et des Bourses de Turquie), Mr Hisarciklioglu a d’emblé prévenu que cela risquerait, en plus des tensions indéniables, d'amener à un boycott des produits français par les consommateurs turcs, ce qu'il regretterait fortement car ces entreprises sont leurs adhérents et qu'il souhaite protéger leurs intérêts. En 2006, après le vote par les députés français de la précédente loi criminalisant la négation du génocide arménien, Ankara avait répliqué en barrant les entreprises françaises du projet de gazoduc Nabucco vers l'Europe, et en interdisant aux avions militaires français de survoler le territoire turc vers l'Afghanistan.

Car ce n'est, en effet, pas la première fois que les parlementaires français s’en vont draguer la communauté arménienne. En 2006, les socialistes avaient déjà proposé une loi sur le génocide arménien …bloquée par la majorité de l’époque.
Cette fois, Sarkozy entend prendre de vitesse l’opposition socialiste, majoritaire au Sénat, susceptible de revenir à l’assaut. Un calcul politique partisan pour un candidat qui porte sur les lois mémorielles un regard à géométrie variable. C’est le même Sarkozy qui en 2007 insister lourdement sur « le refus de la repentance » sur la question coloniale, qui demande aujourd'hui à la Turquie de reconnaître le génocide arménien.

Une fausse bonne idée

Directeur de recherche au CNRS-Ceri, Jacques Sémelin, historien des génocides et massacres de masse,  auteur de Purifier et détruire. Usages politiques des massacres et génocides qualifiait déjà en 2006,  l’initiative de « fausse bonne idée » : « Ils ont raison dans la logique des lois mémorielles françaises, notamment la loi Gayssot. Mais la différence avec le génocide des juifs, c’est qu’il a été en partie commis à partir du territoire français avec les déportations de 1942 alors que le génocide arménien a eu lieu en Turquie. Donc le problème est davantage en Turquie qu’en France. Aujourd’hui, en Turquie, les historiens turcs essayent de faire évoluer les débats sur le sujet ».

Et des débats sur la reconnaissance du génocide arménien ont pu se tenir ces dernières années dans des universités privées en Turquie, alors qu’en toute hypothèse, ce qui est perçu à Ankara comme une ingérence historique –le ministre turc des affaires étrangères affirme que cette loi est une « attaque contre notre dignité nationale »- n’aurait pour conséquence que de renforcer un nationalisme turc problématique lorsqu’il se radicalise autour d’enjeux politiques et mémoriels. Le tout à un moment où les Turcs jouent un rôle stratégique dans la crise syrienne. Mais le si « responsable » Sarkozy a bien d'autres priorités...